Publié le 11 mars 2024

Découvrir la relève artistique québécoise n’est pas qu’une question de lieux, mais de compréhension d’un écosystème vibrant.

  • Les vrais laboratoires de la création sont les centres d’artistes autogérés, bien plus que les galeries commerciales traditionnelles.
  • Soutenir un artiste émergent ne requiert pas une fortune, mais une curiosité active et des stratégies accessibles à tous.

Recommandation : Commencez par louer une œuvre pour tester vos goûts ou visitez un festival-tremplin comme Artch pour affiner votre œil et rencontrer directement les créateurs.

Vous sortez d’une grande exposition au Musée des beaux-arts de Montréal, l’esprit encore vibrant. Mais une question persiste : au-delà des maîtres consacrés, où bat le véritable pouls de la création actuelle ? Où se cachent les artistes qui, aujourd’hui dans l’ombre de leur atelier, seront les grands noms de demain ? La tentation est grande de suivre les parcours balisés, de pousser les portes des galeries chics du Vieux-Montréal en espérant y dénicher la perle rare. C’est une approche, mais elle omet l’essentiel de l’effervescence créative québécoise.

Car la relève ne se trouve pas toujours là où on l’attend. Elle s’épanouit dans un écosystème complexe et passionnant, fait de lieux alternatifs, de réseaux de soutien et de moments-clés où tout se joue. Mais si la véritable clé pour découvrir les talents de demain n’était pas de chercher des œuvres, mais de comprendre ce système ? Si, au lieu de vous comporter en simple spectateur, vous adoptiez la posture du curateur, de l’explorateur averti qui sait lire les signes et identifier le potentiel ?

Cet article est votre guide d’initié. Nous n’allons pas seulement vous donner des adresses. Nous allons vous fournir une carte et une boussole pour naviguer dans l’univers de l’art émergent québécois. Des laboratoires de création aux festivals-tremplins, en passant par les nouvelles formes d’engagement artistique, nous vous donnerons les clés pour devenir plus qu’un amateur d’art : un véritable découvreur de talents.

Pour vous orienter dans cette exploration passionnante, cet article est structuré pour vous guider pas à pas. Vous découvrirez d’abord les lieux essentiels, puis les acteurs, les tendances, et enfin, comment vous pouvez, vous aussi, participer à cette formidable aventure créative.

Le guide des galeries ‘underground’ : où découvrir l’art de demain à Montréal

Pour dénicher la relève artistique, il faut penser au-delà des vitrines lustrées des galeries commerciales. Les véritables pépinières de talents, les laboratoires où l’art de demain prend forme, sont les centres d’artistes autogérés. Ces espaces, financés par des fonds publics et gérés par les artistes eux-mêmes, privilégient l’expérimentation et la recherche plutôt que la rentabilité. C’est ici que les idées les plus audacieuses voient le jour, loin de la pression du marché. Visiter ces lieux, c’est assister en direct au processus créatif.

Montréal regorge de ces hubs créatifs, souvent regroupés dans des édifices industriels reconvertis qui sont devenus les poumons de l’écosystème artistique. L’édifice Belgo, en plein centre-ville, ou le complexe De Gaspé dans le Mile End ne sont pas de simples adresses : ce sont des destinations en soi, des parcours à explorer sur plusieurs étages. Chaque porte ouvre sur un univers différent, une proposition radicale, un dialogue inattendu. Des concepts nomades comme celui de DARE-DARE, qui installe ses bureaux dans une roulotte de chantier, montrent à quel point cette scène est vivante et en constante redéfinition.

Pour l’amateur curieux, voici un circuit initiatique pour plonger au cœur de cet univers :

  • L’édifice Belgo (372, rue Sainte-Catherine Ouest) : C’est le point de départ incontournable. Avec ses cinq étages, il abrite une concentration unique de centres d’artistes comme SKOL, SBC Gallery of Contemporary Art et la Galerie B-312.
  • Le complexe De Gaspé (Mile End) : Explorez ce regroupement de six centres majeurs, dont Optica (spécialisé en photographie et art numérique), le Centre Clark (connu pour ses propositions audacieuses), Dazibao et Occurrence.
  • La Fonderie Darling (Griffintown) : Cet immense espace industriel reconverti est le lieu des installations d’envergure et des résidences d’artistes internationaux. L’échelle y est spectaculaire.
  • DARE-DARE : Repérez sa roulotte décorée qui se déplace dans la ville. Le projet incarne une réflexion sur l’art dans l’espace public et la rencontre avec les citoyens.
  • Les galeries « pro-émergence » : Après cette immersion, visitez des galeries commerciales comme Blouin Division ou Bradley Ertaskiran. Vous y verrez comment certains artistes font la transition de l’expérimentation vers le marché de l’art.

En suivant ce parcours, vous ne ferez pas que voir des œuvres ; vous commencerez à comprendre les dynamiques, les réseaux et les lieux qui structurent l’écosystème de la relève à Montréal.

5 artistes de moins de 30 ans qui sont en train de redéfinir l’art québécois

Plutôt que de vous donner une liste de noms qui serait rapidement obsolète, il est plus pertinent de comprendre le profil type de ces nouveaux créateurs. Qui sont-ils ? Quel est leur parcours ? L’artiste émergent québécois d’aujourd’hui est souvent un artiste-entrepreneur. La créativité pure ne suffit plus ; il doit maîtriser les rouages de l’industrie, des demandes de subvention au réseautage, pour faire exister sa pratique. La compétition est féroce, comme en témoigne le fait de recevoir 500 candidatures pour seulement 21 places au festival Artch 2024, un chiffre qui illustre l’incroyable vitalité et le besoin criant de soutien pour la relève.

Ce sont des créateurs qui ne se contentent plus d’un seul médium. Ils naviguent avec aisance entre la peinture, l’installation, l’art numérique et la performance, créant des œuvres hybrides qui défient les catégories traditionnelles. Leur démarche est souvent le fruit d’une réflexion profonde, nourrie par un parcours académique solide et des programmes de mentorat spécialisés.

Portrait rapproché d'une jeune artiste québécoise travaillant sur une installation textile

Pour repérer ces talents, il faut s’intéresser à leur trajectoire. Un parcours typique n’est pas linéaire, mais ressemble plutôt à un assemblage stratégique d’expériences. Voici les étapes qui jalonnent souvent la carrière d’un jeune artiste prometteur au Québec :

  • Formation universitaire : Un passage par les départements d’arts visuels de l’UQAM ou la faculté des beaux-arts de Concordia est un prérequis quasi systématique, fournissant les bases techniques et conceptuelles.
  • Programmes de mentorat : Des initiatives comme le parcours de 3 mois proposé par Artch sont cruciales. Elles forment les artistes à l’entrepreneuriat, à la gestion de leur carrière et à la communication.
  • Première bourse : L’obtention d’une subvention du Conseil des arts et des lettres du Québec (CALQ) est une étape majeure, un sceau de validation institutionnelle qui finance un projet de création spécifique.
  • Première exposition : Une participation à une exposition dans un centre d’artistes autogéré ou un festival dédié à la relève marque l’entrée officielle dans l’écosystème.
  • Pratique hybride : Le développement d’une pratique qui combine plusieurs médiums est aujourd’hui une signature de la jeune génération, reflétant la complexité du monde contemporain.

En gardant ces étapes en tête lors de vos visites, vous apprendrez à « lire » un CV d’artiste et à identifier ceux dont la carrière est en pleine phase d’accélération.

L’art qui guérit, l’art qui dénonce : les nouvelles tendances de la scène engagée québécoise

L’art émergent québécois n’est pas qu’une affaire d’esthétique. Il est profondément ancré dans les préoccupations de son temps. Les jeunes artistes s’emparent des enjeux sociaux, politiques et identitaires avec une force et une créativité saisissantes. L’art devient une plateforme pour questionner, dénoncer ou proposer des voies de guérison. Cette tendance, souvent qualifiée d’artivisme, se manifeste par des œuvres qui cherchent à provoquer une réaction, à susciter un dialogue plutôt qu’une simple contemplation.

Cette nouvelle vague est portée par une diversité de voix de plus en plus visible. Le paysage artistique s’enrichit grâce à une présence accrue des femmes et des artistes autochtones ou issus de l’immigration parmi les créateurs soutenus, comme le note le CALQ. Cette diversification des points de vue amène de nouvelles narratives, de nouvelles esthétiques et des questionnements essentiels sur l’identité, l’appartenance et la mémoire collective au sein de la société québécoise.

Les plateformes numériques sont devenues un terrain de jeu privilégié pour cet art engagé, permettant de toucher un public plus large et de contourner les institutions traditionnelles. L’interactivité est également au cœur de nombreuses démarches, invitant le spectateur à devenir partie prenante de l’œuvre.

Étude de cas : La montée de l’artivisme numérique et interactif

Le festival Artch est un excellent observatoire de ces tendances. Une édition récente a mis en lumière une artiste d’origine haïtienne qui a reconstitué l’intérieur de sa maison familiale avec des objets et des portraits, interrogeant de manière poignante les notions d’identité, de diaspora et d’appartenance. Dans un autre registre, un artiste a présenté une installation où ses œuvres étaient cadenassées, invitant le public à tenter de les « voler ». Cette démarche ludique et provocatrice initiait une réflexion profonde sur la valeur de l’art, la propriété intellectuelle et la débrouillardise dans un système souvent perçu comme élitiste.

Ces exemples montrent que l’art engagé n’est pas forcément austère ou didactique. Il peut être poétique, ludique et profondément humain, utilisant des stratégies créatives pour aborder des sujets complexes et nécessaires.

En tant qu’amateur d’art, être attentif à ces tendances, c’est se connecter aux conversations les plus importantes de notre époque, celles que les artistes ont souvent la capacité unique de cristalliser.

Comment commencer une collection d’art sans être riche : le guide pour les débutants

L’idée de collectionner de l’art est souvent associée à des fortunes colossales et à des salles de vente aux enchères intimidantes. C’est un mythe qu’il est urgent de déconstruire. Soutenir la relève artistique est non seulement accessible, mais c’est aussi un acte puissant qui a un impact direct sur la carrière d’un créateur. Devenir un collectionneur-mécène, même avec un budget modeste, est l’une des manières les plus gratifiantes de participer à l’écosystème artistique. Il s’agit moins d’un investissement financier que d’un investissement émotionnel et culturel.

La clé est de changer de perspective : au lieu de penser « acheter », pensez « soutenir ». Chaque acquisition, même la plus modeste, est un encouragement, une validation et un soutien financier concret qui permet à un artiste de continuer à créer. De nombreuses options existent pour commencer une collection sans se ruiner, en privilégiant la connexion avec l’œuvre et l’artiste plutôt que la spéculation.

Salon montréalais moderne avec œuvres d'art émergent accrochées aux murs

Le Québec, et particulièrement Montréal, offre un terreau fertile pour les collectionneurs débutants grâce à des initiatives innovantes. Voici cinq façons concrètes et accessibles de commencer à collectionner et soutenir l’art émergent :

  • Louer avant d’acheter : Une initiative géniale comme L’Artothèque propose la location de milliers d’œuvres pour une fraction de leur prix d’achat. C’est la meilleure façon de tester ses goûts, de vivre avec une œuvre et d’affiner son œil avant de s’engager.
  • Participer aux encans des écoles d’art : Chaque année, l’UQAM et Concordia organisent des ventes aux enchères des œuvres de leurs finissants. C’est une occasion en or d’acquérir des pièces de futurs grands noms à des prix très abordables.
  • Acheter directement en atelier : Les événements comme les Portes Ouvertes des ateliers d’artistes (par exemple, dans le Mile End) permettent de rencontrer les créateurs dans leur espace, de discuter de leur démarche et d’acheter des œuvres sans l’intermédiaire (et la commission) d’une galerie.
  • Opter pour les éditions limitées : Pour un premier achat, les estampes, sérigraphies ou photographies en édition limitée sont une excellente porte d’entrée. Elles permettent d’acquérir une œuvre signée d’un artiste que vous admirez pour quelques centaines de dollars.
  • Explorer le sociofinancement : Des plateformes comme Patreon permettent de soutenir mensuellement un artiste. En échange de quelques dollars par mois, vous avez accès à des contenus exclusifs et parfois même à des petites œuvres originales.

En adoptant ces approches, vous réaliserez que le plus grand plaisir n’est pas de posséder un objet, mais de tisser un lien avec la création et de savoir que vous contribuez, à votre échelle, à la vitalité de la scène artistique québécoise.

Art Souterrain, Papier, Chromatic : l’agenda des festivals pour les amateurs d’art émergent

Si les centres d’artistes sont les laboratoires de la création, les festivals et les foires sont les grandes célébrations annuelles de l’écosystème artistique. Ce sont des moments-clés, des rendez-vous immanquables où la scène émergente se présente au grand public, aux collectionneurs et aux professionnels. Pour l’amateur, c’est une occasion unique de prendre le pouls de la production actuelle en un seul lieu et en un temps record. Chaque événement a sa propre personnalité et sa propre mission, de la démocratisation de l’art dans les couloirs du métro à la consécration des nouveaux talents.

Participer à ces événements, c’est bien plus que déambuler dans des allées. C’est l’opportunité de rencontrer les artistes en personne, d’entendre leur démarche de leur propre voix et de voir comment leurs œuvres dialoguent entre elles. Pour un découvreur de talents, c’est le terrain de chasse par excellence. L’importance de ces tremplins est d’ailleurs soulignée par les figures-clés du milieu. Comme le dit Sarah Kitzy Gineau Delyon, directrice générale et artistique d’Artch :

Si tu cherches à savoir quels sont les artistes émergents au Québec, c’est à Artch qu’il faut venir.

– Sarah Kitzy Gineau Delyon, Directrice générale et artistique d’Artch

Cependant, pour tirer le meilleur de ces événements souvent denses et effervescents, une petite préparation s’impose. Y aller à l’aveugle peut être impressionnant, voire décevant. Avoir un plan, même simple, transforme complètement l’expérience.

Votre plan d’action pour les festivals d’art émergent :

  1. Points de contact : Avant de partir, listez les événements majeurs de l’année : Artch (octobre, Place Ville Marie), Foire Papier (avril, Grand Quai du Port de Montréal), Art Souterrain (février-mars, réseau souterrain), MOMENTA Biennale de l’image (automne, lieux multiples), et les expositions des finissants de l’UQAM et de Concordia (mai).
  2. Collecte : Repérez en ligne la liste des artistes et des galeries exposants. Ciblez 3 à 5 noms qui piquent votre curiosité pour commencer votre visite. Téléchargez l’application ou le plan du parcours quand c’est disponible (essentiel pour Art Souterrain).
  3. Cohérence : Le jour J, arrivez tôt. Pour les foires (Artch, Papier), le moment de l’ouverture est idéal pour parler aux artistes et aux galeristes avant la foule. Confrontez ce que vous voyez à vos goûts : qu’est-ce qui vous interpelle ? Pourquoi ?
  4. Mémorabilité/émotion : Prenez des photos (avec permission) des œuvres et des cartels qui vous marquent. Notez le nom des artistes qui vous touchent. L’objectif est de repartir avec des pistes concrètes à explorer plus tard.
  5. Plan d’intégration : Après le festival, suivez les artistes que vous avez aimés sur les réseaux sociaux. C’est le meilleur moyen de connaître leurs prochaines expositions et de continuer à suivre l’évolution de leur travail.

Ces festivals sont les battements de cœur de la scène artistique. En apprenant à y naviguer, vous vous placerez à l’épicentre de la création québécoise contemporaine.

Où apprendre la poterie ou l’aquarelle à Montréal ? Le guide des meilleurs cours et ateliers

La meilleure façon de comprendre et d’apprécier le travail d’un artiste est peut-être de mettre, soi-même, la main à la pâte. S’initier à une pratique créative, même en tant qu’amateur, change radicalement notre regard. On développe une sensibilité à la matière, une conscience de la difficulté technique, une appréciation du temps et de la patience nécessaires à la création. Cet engagement corporel et mental crée une connexion profonde avec le processus artistique, bien au-delà de la simple observation.

Montréal offre une multitude de possibilités pour ceux qui souhaitent explorer leur propre potentiel créatif. Loin des cursus académiques intimidants, de nombreux ateliers proposent des formats courts et accessibles, pensés pour les débutants absolus. L’objectif n’est pas de devenir un artiste professionnel, mais de retrouver le plaisir de faire, d’expérimenter et de se surprendre. Que ce soit en modelant l’argile, en jouant avec les transparences de l’aquarelle ou en découvrant les bases du dessin, ces cours sont des bulles de déconnexion et de reconnexion à soi.

Plonger dans la pratique artistique peut se faire de manière progressive, en respectant son propre rythme et ses envies. Il n’est pas nécessaire de s’engager sur des mois pour commencer. Voici un parcours type pour l’aspirant créateur montréalais :

  • L’atelier découverte : Commencez par un cours d’une seule journée (souvent entre 50 et 80 $) dans un centre d’artistes ou un atelier privé. C’est idéal pour tester une technique sans engagement.
  • Le cours hebdomadaire : Si le coup de cœur se confirme, inscrivez-vous à une session de 6 à 8 semaines. De nombreux artistes émergents locaux animent ces cours (entre 200 et 400 $), une belle façon de les soutenir directement.
  • L’immersion en atelier : Participez aux portes ouvertes des ateliers pour observer différentes techniques et discuter avec les artisans. C’est une source d’inspiration immense.
  • La pratique en collectif : Une fois les bases acquises, rejoindre un collectif d’artistes amateurs ou un atelier partagé permet de pratiquer régulièrement, d’échanger des conseils et de rester motivé.
  • L’exposition communautaire : Pour les plus audacieux, exposer une de ses créations lors d’un événement de quartier ou d’un marché d’artisans est une étape gratifiante qui boucle la boucle du processus créatif.

En devenant vous-même un « faiseur », vous ne regarderez plus jamais une œuvre de la même manière. Votre appréciation gagnera en profondeur, en empathie et en intelligence.

Où refaire le monde à Montréal ? Le guide des clubs de lecture et cafés-philo

Découvrir l’art ne se limite pas à la visite d’expositions. C’est aussi un prétexte formidable pour échanger, débattre et refaire le monde. L’art contemporain, avec ses questionnements et ses propositions parfois déroutantes, est un carburant exceptionnel pour la discussion. Partager ses impressions, confronter ses interprétations et écouter d’autres points de vue enrichit considérablement l’expérience esthétique. Cela permet de mettre des mots sur des ressentis, de construire une pensée critique et de se sentir moins seul face à des œuvres exigeantes.

Montréal, avec sa culture du café et sa vie intellectuelle foisonnante, est le lieu idéal pour ces conversations. Des cercles formels aux rencontres impromptues, les occasions de parler d’art ne manquent pas. Les institutions elles-mêmes encouragent de plus en plus ces moments d’échange, comprenant qu’une œuvre n’existe pleinement que lorsqu’elle est discutée. Ces discussions ne sont pas réservées aux experts ; elles sont ouvertes à tous ceux qui ont la curiosité et l’envie de partager. D’ailleurs, cette vitalité créative ne se limite pas aux arts visuels ; elle infuse tout le paysage culturel québécois, y compris le cinéma. Hugo Latulippe, documentariste, va même jusqu’à dire :

Le cinéma documentaire au Québec est sûrement l’un des territoires de la planète qui a le plus contribué à cette forme d’art dans les 50 dernières années.

– Hugo Latulippe, Documentariste et président de l’Observatoire du documentaire

Cette affirmation montre à quel point le terreau créatif québécois est riche et propice aux débats d’idées. Pour vous joindre à la conversation, voici quelques pistes à explorer à Montréal :

  • Les causeries d’artistes : La Fonderie Darling organise des causeries mensuelles gratuites avec des artistes et des commissaires. C’est une chance unique d’entendre la pensée derrière les œuvres.
  • Les clubs de lecture spécialisés : Des librairies indépendantes comme Formats dans le Mile End animent des clubs de lecture centrés sur des essais ou des catalogues d’art contemporain.
  • Les conférences universitaires : Les départements d’histoire de l’art de l’UQAM et de Concordia proposent régulièrement des cycles de conférences publiques et gratuites sur des sujets de pointe.
  • Les tables rondes des centres d’artistes : Gardez un œil sur la programmation des centres autogérés. Ils organisent souvent des tables rondes en marge de leurs vernissages pour approfondir les thèmes de l’exposition.
  • Les cafés du Mile End : C’est moins formel, mais des lieux comme le Café Olimpico ou le Café Club Social sont des points de rencontre notoires de la communauté artistique, où les discussions s’engagent naturellement.

En vous joignant à ces conversations, vous ne ferez pas que parler d’art : vous participerez activement à la vie intellectuelle et culturelle qui fait la richesse de Montréal.

À retenir

  • L’épicentre de la relève artistique québécoise se trouve dans les centres d’artistes autogérés, véritables laboratoires d’expérimentation.
  • Devenir collectionneur est accessible à tous grâce à des options comme la location d’œuvres, l’achat d’éditions limitées ou le soutien direct via les encans d’écoles d’art.
  • Les festivals comme Artch et la Foire Papier sont des moments-clés pour rencontrer les artistes et prendre le pouls de la création contemporaine en un seul lieu.

Réveillez l’artiste en vous : le guide pour oser un loisir créatif (même si vous pensez être nul)

La barrière la plus tenace pour s’engager pleinement dans le monde de l’art n’est souvent pas financière ou intellectuelle, mais psychologique. C’est le fameux « syndrome de l’imposteur » qui nous murmure : « Je n’y connais rien », « Je ne suis pas créatif », « Ce n’est pas pour moi ». C’est cette petite voix qui nous empêche de pousser la porte d’un atelier ou d’oser un premier achat. Pourtant, l’art n’est pas un club privé réservé à une élite. C’est une conversation à laquelle tout le monde est invité, et la pratique est l’un des meilleurs moyens d’y prendre part.

Oser un loisir créatif, c’est déconstruire l’idée intimidante de « l’Art avec un grand A » pour retrouver le plaisir simple du « faire ». Il ne s’agit pas de produire un chef-d’œuvre, mais de s’autoriser à expérimenter, à se tromper, et à découvrir une nouvelle forme de langage. Cette démarche personnelle a un effet puissant : elle rend humble face au travail des artistes et aiguise notre capacité à apprécier leur maîtrise, leur audace et leur vision.

Étude de cas : De l’amateur au collectionneur, le parcours de l’Artothèque

L’Artothèque de Montréal est un exemple parfait de la manière dont la pratique et la collection se nourrissent mutuellement. Depuis 1995, cet organisme ne se contente pas de louer des œuvres ; il propose aussi des ateliers de création pour les néophytes. L’impact est double. D’une part, les participants aux ateliers développent une connexion plus intime avec le processus créatif, ce qui leur permet de mieux comprendre et apprécier le travail des artistes locaux. D’autre part, de nombreux locataires, après avoir affiné leurs goûts en vivant avec différentes œuvres, franchissent le pas et deviennent collectionneurs. L’Artothèque crée ainsi un pont vertueux entre la pratique amateur et le soutien actif à la scène professionnelle.

Ce parcours montre que le chemin vers l’art est un cercle vertueux. Plus on regarde, plus on a envie de faire. Plus on fait, mieux on regarde. Chaque étape nourrit la suivante, transformant progressivement le simple curieux en un amateur éclairé et passionné.

Le voyage au cœur de la création est sans fin. Pour vous donner l’élan final, il peut être utile de revoir comment démystifier le passage à l'acte créatif.

Alors, la prochaine fois que vous hésiterez devant la porte d’un atelier ou d’une galerie, souvenez-vous que le seul prérequis est la curiosité. Lancez-vous, explorez, pratiquez et participez. La scène artistique québécoise est un univers riche et accueillant qui n’attend que vous.

Rédigé par Julien Côté, Julien Côté est un animateur d'ateliers créatifs et un passionné de loisirs, qui explore depuis 20 ans une multitude de disciplines, des jeux de stratégie à la poterie. Il se spécialise dans la pédagogie pour adultes débutants, persuadé que la créativité est un muscle qui s'entraîne.